La loi n° 2014-788 du 10 juillet 2014 viens de paraître au Journal Officiel, elle renforce l’encadrement des stages, ajoute de nouveaux droits aux stagiaires, et rajoute de nouvelles obligations aux entreprises. Entrée en vigueur partielle le 12 juillet 2014, du fait de l’absence des décrets d’application.
1 – Un stage (ou une « période de formation en milieu professionnel ») n’est pas un emploi :
• Un stage s’inscrit obligatoirement dans le cadre d’un enseignement scolaire ou universitaire l’article L 124-1 nouveau alinéa 1 et L 124-3 du code de l’éducation, prévoit un volume pédagogique minimal de formation en établissement mais il manque le décret d’application (estimé entre 150 h et 200 h).
• Le stagiaire doit se voir confier une ou des missions conformes au projet pédagogique défini par son établissement d’enseignement et approuvées par l’organisme d’accueil (code éducation art. L. 124-1 nouveau, al. 3).
• L’article L. 124-7 du code de l’éducation interdit donc de mettre en place des stages afin d’exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent ; de faire face à un accroissement temporaire de l’activité de l’organisme d’accueil ; de remplacer un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail ; d’occuper un emploi saisonnier.
En conséquence, et d’après l’article L.8223-1-1 du code du travail, l’inspecteur ou le contrôleur du travail qui constaterait qu’un « véritable » poste serait pourvu par un stagiaire doit désormais en informer le stagiaire, l’établissement d’enseignement dont il relève, ainsi que les institutions représentatives du personnel de l’organisme d’accueil, dans des conditions à fixer par décret.
De ce fait, lorsqu’un stagiaire saisit le conseil de prud’hommes d’une demande de requalification du stage en contrat de travail (prévu par l’article L1454-5 du code du travail), l’affaire est désormais directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d’un mois suivant la saisine.
2. Un encadrement renforcé :
Conclusion obligatoire d’une convention tripartite signée par le stagiaire, l’organisme et l’établissement d’enseignement (c. éduc. art. L. 124-1 nouveau, al. 2). Les mentions obligatoires seront précisées par un décret, qui ajustera certainement l’actuelle liste des clauses obligatoires.
La convention devra préciser les compétences à acquérir ou à développer durant le stage et la manière dont ce temps s’inscrit dans le cursus de la formation (c. éduc. art. L. 124-2 nouveau, 2°).
L’Établissement d’enseignement doit désigner un enseignant référent, chargé du suivi du stage et du respect de la convention (c. éduc. art. L. 124-2 nouveau). À plusieurs reprises durant le stage, l’enseignant référent est tenu de s’assurer de son bon déroulement auprès du tuteur désigné dans l’organisme d’accueil. Si besoin, il peut proposer une redéfinition d’une ou des missions pouvant être accomplies (c. éduc. art. L. 124-1 nouveau, al. 4).
L’entreprise d’accueil doit désigner un tuteur chargé de l’accueil du stagiaire et de son accompagnement. Il a également pour mission de s’assurer du respect des aspects pédagogiques de la convention de stage (c. éduc. art. L. 124-9 nouveau). Un décret encadrera le nombre maximal de stagiaires qu’un tuteur peut suivre en même temps. Il est en effet prévu qu’un tuteur ne peut pas être désigné si, à la date de conclusion de la convention de stage, il est déjà tuteur dans un nombre de conventions prenant fin au-delà de la semaine en cours supérieur au plafond fixé par décret (c. éduc. art. L. 124-10 nouveau).
L’organisme d’accueil doit respecter un délai de carence entre deux conventions de stage sur un même poste, égal au tiers de la durée du stage précédent. Cette règle n’est pas modifiée par la loi, seulement recodifiée (c. éduc. art. L. 124-11 nouveau). Un même stagiaire ne peut pas effectuer plus de 6 mois de stage par année d’enseignement dans le même organisme d’accueil et la loi supprime toute dérogation à cette règle (c. éduc. art. L. 124– 5 nouveau).
Le nombre de stagiaires dont la convention de stage est en cours sur une même semaine civile dans l’organisme d’accueil (entreprise, association, etc.) ne peut pas être supérieur à un nombre qui sera fixé décret (c. éduc. art. L. 124-8 nouveau). Le non-respect du quota, constaté par l’inspection du travail, pourra entraîner une amende maximum de 2 000 € par stagiaire, doublée en cas de récidive dans un délai d’un an (c. éduc. art. L. 124-17 nouveau). De plus l’inspecteur ou le contrôleur du travail en informera le stagiaire, l’établissement d’enseignement dont il relève, ainsi que les institutions représentatives du personnel de l’organisme d’accueil, dans des conditions à fixer ultérieurement par décret (c. trav. art. L. 8223-1-1 nouveau).
L’entreprise d’accueil devra inscrire les noms et prénoms des stagiaires accueillis dans l’établissement, dans une partie spécifique du registre unique du personnel (c. trav. art. L. 1221-13 modifié).
3. Rémunération augmentée :
La loi impose une gratification pour les stages d’une durée supérieure à 2 mois consécutifs (ou 2 mois non consécutifs au cours d’une même année scolaire ou universitaire) (c. éduc. art. L. 124-6 nouveau). La règle est ici simplement recodifiée, sans aucun changement.
Le montant de la gratification minimale reste fixée par convention de branche ou accord professionnel étendu (c. éduc. art. L. 124-6 bien que nouveau, même règle qu’antérieurement).
À défaut, pour les conventions de stages conclus à compter du 1er septembre 2015, la gratification sera égale à 15 % du plafond horaire de la sécurité sociale par heure (c. éduc. art. L. 124-6 nouveau ; loi 2014-788 du 10 juillet 2014, art. 1-II). À titre indicatif, sur la base du plafond horaire 2014 (23 €), la gratification minimale pour une durée de présence de 35 heures hebdomadaires serait de : 23 € X 15 % X 151,67 = 523,26 €, au lieu de 436,05 € aujourd’hui.
Les stagiaires bénéficient désormais du même régime que les apprentis. Ainsi, la gratification est exonérée d’impôt sur le revenu dans la limite du montant annuel du SMIC. Cette mesure bénéficie directement aux stagiaires ou à leurs parents lorsqu’ils sont rattachés à leur foyer fiscal (CGI art. 81 bis modifié).
Les gratifications versées aux stagiaires ne sont pas assujetties à cotisations dans la limite de 12,50 % du montant horaire du plafond de la sécurité sociale (23 € en 2014) multiplié par le nombre d’heures effectuées en stage durant le mois considéré (c. séc. soc. art. L. 242-4-1 et D. 242-2-1). En revanche, la fraction excédentaire est assujettie aux cotisations de sécurité sociale, à la CSG et à la CRDS, à la contribution solidarité autonomie, au FNAL et, s’il y a lieu, au versement de transport.
Le code de la sécurité sociale sera-t-il modifié pour faire correspondre l’exonération (12,50 %) avec la rémunération minimale (15 %) ?
4. Droits des stagiaires et mesures diverses :
Les stagiaires sont expressément placés sous le régime des règles applicables aux salariés de l’organisme d’accueil en matière de (c. éduc. art. L. 124-14 nouveau) : présence de nuit ; durées maximales de présences quotidienne et hebdomadaire ; repos quotidien, repos hebdomadaire et jours fériés.
Les stagiaires ont désormais droit à des congés et autorisations d’absence d’une durée équivalente à celles prévues en faveur des salariés en cas de grossesse, de paternité ou d’adoption (c. éduc. art. L. 124-13 nouveau).
Les stagiaires ont désormais accès au restaurant d’entreprise ou aux titres-restaurant et à la prise en charge des abonnements aux transports publics pour le trajet « domicile-lieu de stage » dans les mêmes conditions que les salariés (c. éduc. art. L. 124-3 nouveau, al. 3). Jusqu’à présent, ce n’était pas légalement obligatoire.
Tous les stagiaires bénéficient de ces droits, y inclus ceux ayant des stages inférieurs à 2 mois.
Désormais, lorsqu’un stagiaire engage une action en reconnaissance d’une faute inexcusable contre l’établissement d’enseignement, celui-ci est tenu d’appeler en la cause l’organisme d’accueil. Le but est qu’il soit statué dans la même instance judiciaire sur la demande du stagiaire et sur la garantie des conséquences financières d’une reconnaissance éventuelle de faute inexcusable (c. séc. soc. art. L. 452-4 modifié). Chose qui n’était pas le cas jusqu’à présent, car le stagiaire était placé sous la responsabilité de l’établissement d’enseignement.
D’autres informations dès la parution des décret d’applications.
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